[LIEU] Le Paradis de l'Aventurier

[Balthasar]

Inquiet, Balthasar se précipita.

- Ça va, petit ? Rien de cassé ?

Rassuré de voir que le petit vendeur était toujours en un seul morceau, le vagabond se mit à rire en songeant qu'il appelait :petit" une créature qui si ça se trouve, était plus âgée que lui.

- Pardonnez-moi, fit-il, je ne voudrais pas paraitre importun, mais vous êtes du Petit Peuple, n'est-ce pas ? Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas croisé l'un d'entre vous. Elwen est vraiment une ville sans pareille ! Pas plus tard que ce matin, j'ai rencontré...

Il s'interrompit brusquement. Ce secret n'était pas le sien et la femme semblait désireuse de rester discrète.

- Mais peu importe, poursuivit-il avec un geste vague. Pour répondre à votre question, je suis juste de passage, et je ne me produis nulle part. Mais je serais ravi de revenir vous chanter quelque chose, si vous voulez. Dites-moi, auriez-vous une auberge à me conseiller ? Une correcte, mais pas trop chère ?

[La Conteuse]

Le "petit" lui confirma qu'il était un faune du Petit Peuple, et qu'Elwen était une cité cosmopolite même si le sens de ce mot lui échappait.

"Oh Oui revenez ! Vous serez toujours le bienvenu ici ! Pour les auberges, il y a l'Espadon qui n'est pas trop cher, c'est l'auberge des mercenaires, autrefois ce n'était qu'une taverne, puis le Conseiller Crocs l'a transformée en auberge. Mais si vous n'avez pas beaucoup de disponibilité il faut aller à l'Antre des Gargouilles, tout y est gratuit. C'est une auberge de chez nous qui suite à un accident magique s'est retrouvée sur la place où nous sommes. Mais si vous avez besoin de sous, allez ouvrir un compte à la banque des gnomes, le roi a négocié avec eux pour qu'ils versent à chaque Elwénien une somme pour vivre chaque jour."

[Balthasar]

Balthasar rangea ses emplettes dans une des poches intactes de sa bure, donna la somme due au gentil commerçant et s'inclina pour le saluer.

- Merci pour ces renseignements, messire faune, et pour l'heureuse rencontre. Je vais suivre vos conseils et profiter des largesses de ce bon roi, et du sieur Crocs. Une telle aubaine ne se refuse pas. J'en ferai une chanson et je viendrai vous la chanter, si cela vous sied.

Il appela Tidrak, qui revient en bougonnant se blottir dans sa capuche. Le vagabond jeta un regard nostalgique autour de lui et soupira.

- Je te comprends, bonhomme, murmura-t-il au dragonnet. Moi aussi, je me sens bien ici. Mais il faut que nous y allions. Tu le sais.

Un dernier regard et il franchissait la porte, l'humour déjà assombrie à l'idée de devoir retourner dans le monde extérieur.

[La Conteuse]

Le faune était déjà repartis dans ses "rangements". Et la boutique qui ne payait pas de mine de l'extérieure redevint un boutique quelconque vue depuis la rue.

[L'Archiviste]

Le vieil archiviste déboula dans la boutique insignifiante, clignant des yeux pour accommoder sa vue à l'obscurité après la vive lueur du soleil printanier. Il poussa un soupir de soulagement en entendant chanter au milieu de l'amoncellement d'objets qui caractérisait le lieu. Trébuchant par ci sur une caisse, par là sur une épée dont on se demandait bien ce qu'elle fichait par terre, il avança tant bien que mal jusqu'au fond de l'échoppe, où un Balthasar enjoué poussait la chansonnette pour un faune visiblement enthousiaste - du moins si on en croyait la manière dont il accompagnait le vagabond en tapant vigoureusement du sabot, plus ou moins en rythme.

- Ah enfin, je vous retrouve ! s'exclama-t-il sans se soucier d'interrompre l'artiste. Je vous ai cherché dans toutes les auberges de la ville, en vain ! Il faut que je vous parle ! Cela concerne Tidrak !

Le petit dragonnet trilla une question perplexe, tandis que le prétendu mendiant s'interrompait, avec un regard d'excuse au petit faune déçu.

- Nous avons reçu des publications d'une société naturaliste qui étudie les dragonnets, annonça-t-il. Rien encore sur les dracofées, mais j'ai eu l'assurance que ça ne saurait tarder.

Il leva un doigt pour couper la parole à Balthasar qui ouvrait la bouche pour intervenir. On sentait dans ce geste toute l'expérience du bibliothécaire, habitué à obtenir le silence sous peine d'éviction immédiate.

- Mais ce n'est pas pour ça que je vous cherchais. La société cherche des recrues. Ils veulent remonter des expéditions pour poursuivre leurs études. Je me suis dit que cela vous intéresserait peut-être. Je veux dire... (il regarda Balthasar d'un air appréciateur) personne ne croirait une seconde que vous ne soyez que ce que vous prétendez être.

Il réalisa soudain le regard de reproche que lui lançait le propriétaire des lieux et prit un air contrit.

- Mais je vous ai interrompu, s'excusa-t-il. Désolé, Maître Faune, je ne savais pas que mon ami ici présent vous connaissait, ni qu'il chantait pour vous.

[La Conteuse]

"Oui. Bon. Je veux bien croire à votre contrition. A condition que vous veniez écouter vous aussi la chansonnette. Ensuite nous verrons pour recruter des aventuriers."
D'un coup de pied il dégage un tabouret pour que l'Archiviste s'y asseye.